La bourgeoisie qui brûle Imprimer

Annexe - La bourgeoisie qui brûle

La Bourgeoisie qui brûle

André Germain (1)

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Thiers, qui vit mon père à l'oeuvre, conçut pour lui une estime et une admiration très grandes. Il lui en donna la preuve en lui offrant le Ministère des Finances. Cc Ministère fut, au fond, le rêve constant de la vie de mon père. Seulement, il ne voulait l'accepter que de mains dignes et sûres. II l'avait refusé l'année précédente quand, par l'intermédiaire de M. Léon Chevreau, l'Empire expirant le lui proposa, il allait le refuser encore, dix ans plus tard, quand Gambetta lui proposa de faire partie du  « grand Ministère ». Cette fois, il accepta avec enthousiasme. Or, à la dernière minute, il se produisit une intervention extraparlementaire bien étrange. M. Alphonse de Rotschild fit savoir qu'il n'admettait pas la nomination de mon père. Thiers s'inclina. I1 poussa même la défaite jusqu'à accepter, des mains de M. de Rotschild, le nouveau ministre des Finances, Léon Say. La puissance des Rotschild, comme, plus tard, la puissance des Wendel, était au‑dessus des lois.
Et, à ce sujet, j'ai un autre fait à citer, qui ne se rattache pas à la vie de mon père, mais qui nie paraît trop important pour être omis. En 1889, les Rotschild, pouvoir obscur qui plana longtemps au‑dessus de la France, avaient contribué, par leur influence et par leurs spéculations, à la déconfiture de deux grandes entreprises, françaises, le Comptoir d'Escompte et la Société des Métaux. Le principal administrateur de ces deux affaires, M. Denfert‑Rochereau, se suicida. Avant de prendre son revolver, il écrivit à ses plus intimes amis, M. et Mme Frédéric Masson : « Je me tue. mais ce sont les Rotschild qui sont responsables de tout. J'ai contre eux, dans le tiroir de mon bureau, des documents écrasants. Venez les prendre. » M et Mme Masson accoururent chez M. DenfertRochereau qui venait d'expirer. Les documents étaient déjà volés. M, et Mme Masson apprirent .plus tard qu'ils avaient été volés par un employé de M. Denfert‑Rochereau, auquel les Rotschild servirent une rente. Je tiens l'histoire de M. et Mme Masson eux‑mêmes, qui me la racontèrent vingt ans après.
C'est durant cette période, ‑ 1871‑1877 – que mon père prit la part la plus activa à la vie politique. Lui quiétait si indépendant, il accepta de se laisser enrôler. Il accepta d'entrer dans la coalition qui défendait la République, il se battit avec entrain contre les Conservateurs.

 

(1) Annexe de la page "Alise, un village gaulois, dit mandubien" , et la Tour malakoff  note 28 .

 

Mise à jour le Lundi, 12 Avril 2010 18:50