De l'inexpugnabilité d'Alise-Alesia Imprimer

 

DE L'INEXPUGNABILITE D'ALISE-ALESIA

 

Cette étude s'est autorisée à remarquer que la méconnaissance de la région correspondant au pays lingon, et plus particulièrement au nord d'Avallon, et l'ignorance du latin, non seulement n'étaient pas un obstacle à l'éclosion d'affirmations décisives à propos d'Alésia mais encore une possibilité argumentaire contre l'hypothèse exposée ici telle par exemple cette réflexion d'un interlocuteur "Je ne sais toujours pas la différence entre une contrevallation et une circonvallation mais cette étude n'est pas crédible". (A rapprocher de cette considération d'un autre, distingué par des honneurs officiels, "J'espère que maintenant on reconnaîtra l'intérêt de mes travaux").

Un troisième point ne mérite-t-il pas un examen, la connaissance du texte ou du moins sa perception. "Il était évident que cet oppidum d'Alesia, situé au sommet d'une colline, en un lieu extrêmement élevé ne pouvait être pris, sinon par un siège" (VII-69-I). Est-ce qu'Alise-Sainte-Reine, si on admet qu'elle est l'emplacement d'Alésia, a l'air imprenable ? L'admettre est faire peu de cas de certains sièges de César. Certes la place était à l'abri d'un coup de main imprévu ou d'une attaque gauloise mais certainement pas d'une attaque menée par les Romains. L'accès par le plateau n'a rien d'insurmontable surtout si on se réfère à certains sièges entrepris par César. Ainsi les sièges d'Avaricum ou de Gergovie pourraient être évoqués à titre de comparaison. Alise-Sainte-Reine ne suggère vraiment pas de difficultés de l'ordre de celles exposées par César à propos de ces deux villes. Celui-ci n'était pas du genre à renoncer : il juge que la place ne peut être prise d'assaut.

A-t-on un autre exemple dans les Commentaires d'oppidum irréductible ? Oui, l'Aduatucorum oppidum (II-29-2 et II-33-6). La garnison se moque des préparatifs de siège des Romains ridicules aussi en raison de leur petite taille. Les spécialistes orientent leur choix sur Namur parmi d'autres possibilités. Cet oppidum à l'intérieur du confluent de la Sambre et de la Meuse (comme l'oppidum du Beustiau à Givry (Yonne) à celui de la Cure et du Cousin) était en effet construit sur une position impressionnante et on comprend que les Aduatuques l'aient cru invulnérable. On sait qu'en 14-18 la forteresse de Namur fut le théâtre de combats acharnés et meurtriers. César n'en installa pas moins ses machines et les assiégés lui ouvrirent les portes, effrayés en définitive par les préparatifs des Romains. Les Aduatuques qui s'étaient engagés à rendre leurs armes en gardèrent une partie et crurent pouvoir venir à bout des Romains grâce à cette trahison. Ils finirent vendus à l'encan.

Cet oppidum formidable (comme à Namur) n'a donc pas découragé César. Cela revient à dire qu'Alésia non seulement était aussi redoutable mais encore beaucoup plus puisqu'au premier coup d'oeil César renonce à le prendre d'assaut. Alise à cet égard n'a rien d'exceptionnel.
Ajoutons que les Aduatuques se croyant à l'abri narguaient les Romains alors que les Gaulois de Vercingétorix, terrifiés eux, se savaient à l'abri d'un assaut ce que les travaux de César leur confirmaient.

Ce site du Beustiau offre cette certitude au contraire d'Alise. Alise n'est pas "egregie natura munitum" (II-29-2).
Les assiégés ne manifestent pas d'inquiétude particulière au sujet d'un assaut romain contre Alesia. Ils sont en revanche terrifiés parce que la cavalerie gauloise, le meilleur de l' armée, vient de se faire étriller. On peut s'étonner.

C'est la deuxième fois dans le VIIe livre que la cavalerie romaine secondée par les Germains bat la cavalerie gauloise (voir VII-13). On se rappelle que les Gaulois seront défaits dans quatre batailles de cavalerie au cours de ce VIIe livre.
La cavalerie germaine approche sans coup férir des murs de l'oppidum ce qui plaiderait en faveur d'Alise suivant le point de vue exprimé ci-dessus. Le problème pour César était d'approcher suffisamment près ses machines de siège des murailles. Possible devant Alise l'opération s'avérait impossible à Blannay en raison de la pente environnante.


Au cas où les explications précédentes n'auraient pas été assez claires le petit schéma qui suit tente de les compléter.

 

 

inexpugnabilite_d_alise_alesia

 

Outre l'impossibilité d'assoiffer les assiégés car on ne pouvait les couper de l'approvisionnement en eau, la disposition des lieux au Beustiau était absolument dissuasive entraînant la décision instantanée prise par César de construire des contrevallations. On ne voit pas très bien ce qui est absolument dissuasif à Alise.


La comparaison effectuée plus haut entre l'oppidum des Aduatuques et Alise propose le site de Namur comme emplacement du premier en retenant l'avis assez général des spécialistes. Il se pourrait cependant que ce ne soit pas le cas ce qui n'enlèverait rien à la qualité d'inexpugnabilité de l'oppidum belge s'il était ailleurs, puisque les Aduatuques avaient le choix. Une autre hypothèse serait au moins de qualité défensive égale.


Il convient de noter une particularité des fortifications de Vercingétorix à Alésia (voir VII-69-5) déjà évoquée bien entendu mais qui s'inscrit tout particulièrement dans la cohérence de l'analyse effectuée ici ; "sous la muraille , cette partie de la colline regardant vers le soleil levant, endroit rempli de troupes gauloises, les Gaulois avaient conduit un fossé et un mur de pierres sèches de six pieds de haut". On sait que des cavaliers germains (VII-70-4 et 5) s'en soucièrent peu, et ayant laissé leurs chevaux, entreprirent le franchissement de ce fossé et de ce mur. Ce dispositif déjà inconsistant face à des guerriers décidés, aurait été sans aucune efficacité contre les machines romaines si redoutées des Gaulois : ceux-ci, comme César, savaient qu'elles ne pouvaient venir jusqu'à eux.
C'est évident au Beustiau, aucunement à Alise sauf dans l'esprit de stratèges du type de Napoléon III et de ses disciples.

Mise à jour le Jeudi, 03 Mai 2012 09:48